Les débuts du patrimoine aérospatial d’Armour Heights

Armour Heights Aerodrome (from Walter Hurst)
Aérodrome d’Armour Heights

Le mois d’avril est un mois d’une importance particulière pour l’histoire de l’aviation canadienne. Cette année marque le 100e anniversaire de la création de l’Aviation royale du Canada (ARC) le 1er avril 1924, un événemement qui sera été souligné au Collège des Forces canadiennes (CFC). L’histoire d’Armour Heights, où se situe actuellement le campus du CFC, se distingue par un autre fait historique.

Accueillant d’abord le Collège de guerre de l’état-major de l’ARC fondé en 1943, le site du CFC à Armour Heights a toujours été un haut lieu de l’aviation civile et militaire. Un terrain d’aviation, construit en 1917 aux fins d’entraînement du Royal Flying Corps (RFC), jouxtait l’emplacement actuel du campus. La piste d’atterrissage se trouvait autrefois tout près de l’échangeur situé à l’angle de la rue Avenue et de l’autoroute 401. En 1918, la School of Special Flying est mise sur pied pour former les instructeurs du RFC aux nouvelles techniques d’instruction récemment apparues. En 1919, le terrain d’aviation est pris en charge par la Bishop-Barker Aeroplanes Limited, une entreprise commerciale lancée par deux éminents pilotes de combat, William Avery Bishop et William George Barker, tous deux récipiendaires de la croix de Victoria.

Curtis JN-4 (from J.A. Des Roches)
Curtiss JN-4 Canuck

Le campus du CFC est situé sur les lieux de l’ancien domaine du colonel Frederick B. Robins, que celui-ci avait nommé Strathrobyn et dont la splendide demeure qu’il y fit construire en 1914 est aujourd’hui occupée par le Mess des officiers d’Armour Heights. Passionné par tout ce qui touchait au monde militaire, le colonel Robins, qui avait été nommé colonel honoraire du Toronto Scottish Regiment, était trop avancé en âge pour participer à la Grande Guerre mais désirait appuyer l’effort de guerre au pays. À titre de courtier en immeuble, il loue une parcelle de 393 acres à l’ouest de Strathrobyn, délimitée à l’ouest par la rue Bathurst, au sud par l’avenue Wilson, à l’est par la rue Sandringham et le boulevard Yonge et au nord, par la vallée de la rivière Don. En avril 1917, le RFC loue la propriété du colonel Robins au prix d’un dollar par année, le contrat de location devant prendre fin au terme de la guerre ou en mai 1919, selon la première éventualité.

Les travaux pour la construction du terrain d’aviation débutent en mai et se terminent en septembre. Six hangars sont disposés en deux rangées de trois, suivant une orientation est-ouest, environ 900 mètres à l’ouest de Strathrobyn et 400 mètres au nord de l’avenue Wilson. D’autres bâtiments sont construits le long de ce qui est aujourd’hui la rue Sandringham, faisant dos à la vallée. Les premiers vols sont effectués dès juillet 1917, avant que ne soit achevée la construction des installations de soutien.

Curtiss JN-4 (from J.A. Des Roches)
Curtiss JN-4 (Can)

Les cadets du RFC qui venaient suivre une formation au pilotage à Armour Heights étaient choisis parmi des milliers de candidats canadiens. Suite à leur formation au sol, les apprentis pilotes accomplissaient au moins dix heures de vol en solo à bord du Curtiss JN-4 Canuck, avant de suivre une formation plus poussée au camp Borden. En échange d’avoir pu s’entraîner au Texas en hiver, le RFC convient de former aussi 300 pilotes américains au Canada, dont plusieurs seront formés à Armour Heights. Le premier incident mortel survient en août 1917 lorsque deux avions pilotés en solo par des cadets américains entrent en collision et s’écrasent au sol.

Curtiss JN-4 (from J.A. Des Roches)
Curtiss JN-4 (Can)

Les vols se poursuivirent à Armour Heights pendant l’hiver et, en février 1918, presque tous les aéronefs sont munis de skis. Le printemps suivant, la School of Special Flying est mise sur pied pour former les instructeurs du RFC aux dernières techniques d’instruction. Au premier plan de ces nouvelles techniques figure le “vol d’acrobatie” ou la “voltige aérienne” caractérisée par les boucles, les tonneaux, les vrilles et le vol en rase-mottes. Au cours des six premiers mois de l’année 1918, le taux d’accidents mortels durant la formation au pilotage s’établit à un décès pour 1 800 heures de vol mais en octobre, le taux chute à un décès pour 6 000 heures de vol, comme conséquence directe des nouvelles techniques.

À la fin de la Grande Guerre en novembre 1918, les opérations de formation au pilotage diminuent progressivement et l’aviation royale, comprenant le RFC et le Royal Naval Air Service, quitte Armour Heights en janvier 1919. C’est le début de l’ère de l’aviation civile avec la Bishop-Barker Aeroplanes Limited, qui mène ses opérations à partir du terrain d’aviation. Lorsque la compagnie fait faillite à l’été 1921, le terrain d’aviation tombe en désuétude.

Photos : gracieuseté de J.A. Des Roches et Walter Hurst.

Référence : Shields, William R. Canadian Forces Command and Staff College: A History 1797-1946, (Ébauche) Toronto : Collège des Forces canadiennes, 1987. [355.0070971 S44]

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